UNE METHODE POUR COMMUNIQUER AVEC LES PERSONNES TRES AGEES DITES
DESORIENTEES
La
communication avec les personnes âgées désorientées est problématique, pour les
soignants et leur entourage, car elles ont des comportements souvent très
choquants et déstabilisants.
Ils
se sentent démunis, malheureux, impuissants et ressentent du mal être face à
l’incommunicabilité qui s’installe.
Comment
communiquer autrement?
La
validation permet de réintroduire une communication indispensable au bien-être
et d’être à l’aise dans l’accompagnement affectif des personnes âgées
désorientées.
Qu’est ce que la validation ?
C’est
une méthode qui a été élaborée par Naomi FEIL (psychologue et
sociologue).
Elle
est partie de l’idée qu’une personne âgée aspire à terminer sa vie en paix avec
elle-même et avec les autres en ayant le sentiment du devoir accompli.
C’est
une méthode
de communication avec les personnes très âgées dites désorientées.
C’est
aussi un processus qui prend du temps, qui s’adapte à l’état de la personne.
Cette
méthode s’appuie sur des théories psychologiques :
Chaque
personne est unique et doit être traitée en tant qu’individu (A. Maslow),
Chaque
personne est importante qu’elle soit désorientée ou non (N. Feil),
Il
y a toujours une raison qui motive le comportement des personnes désorientées
(N. Feil),
Le
comportement des personnes âgées n’est pas seulement lié aux modifications
anatomiques du cerveau mais reflète l’ensemble des changements physiques,
sociaux et psychologiques qu’elles ont connu au cours de toute leur vie ( A.
Verwoerd),
On
ne peut pas obliger une personne âgée à modifier ses comportements,
Les
personnes âgées doivent être acceptées sans jugement (C. Rogers),
Des
tâches sont associées à chaque étape de l’existence. Une tâche non accomplie
peut engendrer des manifestations psychologiques (Erickson cf
1),
Les
sentiments douloureux diminuent s’ils sont exprimés, reconnus et validés par
une personne digne de confiance qui sait écouter. Ignorés ou niés, ces
sentiments douloureux s’intensifient (Yung),
L’empathie
crée la confiance, réduit l’anxiété et restaure la dignité (C. Rogers)
Les buts de la validation
Elle
permet :
De construire une relation de confiance induisant un sentiment
de sécurité chez la personne âgée : elle se sent aimée.
De rejoindre la personne âgée : le soignant a sa
propre réalité, la personne âgée la sienne. L’accepter, c’est pouvoir
l’accompagner dans sa réalité en créant un sentiment de reconnaissance, de
dignité.
D’aider les personnes âgées à regagner une certaine
confiance et à retrouver leur dignité.
De permettre à la personne âgée de mourir dans la
dignité.
Qui sont les personnes très âgées dites
désorientées ?
Elles
ont généralement plus de 80 ans.
Elles
sont
dans leur monde, leur réalité. Elles vivent des choses anciennes. Elles
repartent en arrière dans leur réalité.
Elles
parlent souvent un langage que les membres de la famille ou le soignant ne
comprennent pas.
Elles
ont
subi beaucoup de pertes :
Pertes
sociales
Perte
du travail, du rôle de parent,
Perte
des repères géographiques en allant vivre ailleurs,
Disparition
des amis,
Pertes des relations sociales…
Pertes
physiques
Pertes
au niveau :
-
de la mobilité,
-
de l’audition,
-
de la vision,
-
de l’odorat,
-
du goût.
Apparition
de l’incontinence parfois.
Pertes
psychologiques
De
nombreux deuils ont été vécus :
-
perte du conjoint,
-
parfois perte des enfants,
-
perte des amis.
Face
à toutes ces pertes, la personne doit faire un travail de deuil (cf 2).
Ce
travail de deuil permet de passer toutes les étapes pour arriver à une
acceptation, de vivre, de rebondir : on peut parler de résilience.
Certaines
personnes très âgées ont traversé des pertes sans avoir effectuer
le travail de deuil.
On
peut émettre l’hypothèse que la désorientation des personnes très âgées vient
du cumul des pertes sociales, psychologiques, émotionnelles et que la
désorientation s’inscrit dans la lutte normale pour soigner les vielles
blessures.
En
fait plusieurs causes peuvent être à
l’origine de leur désorientation : la maladie d’Alzheimer, les troubles
liés à la fin de vie, le cumul des pertes et
l’absence du travail de deuil.
Les objectifs de la validation
Pour
le soignant à court terme, il
s’agit d’établir une relation de confiance et de permettre à la personne de
dire ce qu’elle a envie de dire, ce qu’elle est en train de vivre.
Il crée les conditions optimales pour que la
personne âgée puisse dire ce qu’elle a à dire.
Il
va aussi la rejoindre sur le plan émotionnel.
Il
l’accompagne, se met à sa « hauteur », suit la direction qu’elle
donne.
Il
se met en situation d’empathie en utilisant des outils comme l’écoute active,
la programmation neuro-linguistique, l’analyse transactionnelle.
Pour
la personne très âgée désorientée,
il s’agit de :
-
Résoudre les
conflits non terminés en exprimant les émotions qu’elles ont refoulées dans
leur jeunesse,
-
Revivre les
plaisirs passés : remplacer la pensée intellectuelle par l’émotionnelle,
-
Réactiver les
souvenirs sensoriels pour soulager les ennuis, le stress,
-
Repousser les
sentiments douloureux d’inutilité et de solitude.
La
validation permet au soignant d’introduire une étape de résolution des pertes
pour permettre à la personne âgée de remettre de l’ordre dans sa vie.
Elle
permet aussi à la personne de retrouver un espace de communication verbale ou
non verbale pour exprimer ce qu’elle souhaite.
Muriel
MARIE-APPOLINE SILVE
Ce compte rendu a été réalisé à partir
de la conférence de Mme Sylvie LENFANT (directrice en maison de retraite,
teacher validation) et M Guy
MULLIEZ (teacher en validation).
Nous les remercions pour la qualité de
leur intervention et l’ouverture professionnelle apportée par cette méthode.
La
Validation Pour aller plus
loin
Validation, méthode Feil. Pour une vieillesse pleine
de sagesse. Edition Lamarre. 2006.
Fondation nationale de gérontologie www.fng.fr
Gérontologie en institution www.membres.lycos.fr/papidoc/
Images pour Maslow sur Google.
Le développement de la personne. Carl Rogers. Inter
éditions 2005.
(1) Petit résumé des étapes de la vie
d’Erickson.
La
petite enfance : j’apprends à m’aimer, à faire confiance quand il y a
frustration. (Je pleure, l’adulte répond, je me sens en sécurité).
L’enfance : j’apprends à me faire confiance. .Je suis les règles et je suis heureux d’y parvenir.
L’adolescence :
je crée ma propre identité en m’opposant à mes parents.
L’adulte :
je partage mes émotions, mon intimité. Je suis responsable de mes émotions, de
mes erreurs et de mes succès.
L’âge
mûr : je fais le deuil de mes activités, de certains rôles dépassés
et j’ai d’autres projets.
L’âge
avancé : je boucle ma vie. Je mélange le passé au présent et me donne de
nouveaux buts et j’ai besoin de mourir
en paix.
Naomie
Feil a rajouté :
Très
grand âge : je veux résoudre mon passé pour mourir en paix.
(2) Le deuil est un mécanisme psychologique fondamental quoi
s’applique à toute perte douloureuse qu’il s’agisse de l’être aimé ou d’un
animal.
(3) La roue des émotions.
L’émotion est quelque chose de fugace. C’est une réaction affective naturelle face à ce qui nous arrive. Elles sont l’expression de notre vie affective. La personne passe très vite d’une émotion à une autre d’où la notion de roue.